2021-12-13

Qu'est-ce qu'un site web écoresponsable ?

Julien Wilhelm

En 2021, environ 60% de la planète est connectée à Internet. Fort d'un nombre d'utilisateurs croissant et d'une diversification de ses usages, le Numérique est déjà responsable de 4% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, soit plus que l'aviation civile, souvent pointée du doigt pour sa participation au réchauffement climatique*.

Nous, développeurs témoins des enjeux environnementaux et sociétaux du Numérique, avons le devoir d'agir. Faute de pouvoir à notre échelle repenser des technologies toutes entières, nous pouvons limiter la consommation des services que nous concevons et freiner la nécessité du renouvellement des équipements tout en améliorant, de manière significative, le confort des utilisateurs au quotidien.

Cet article est une introduction à l'écoresponsabilité en matière de création Web ; j'en ai fait mon métier. Ayant vocation à toucher une large audience, les 3 premières parties traitent de considérations théoriques. La dernière, sur un document à part, recèle de notions techniques permettant d'aller plus loin dans la compréhension et la mise en oeuvre d'une démarche d'écoconception en projet Web.

Note : S'agissant de mon coeur de métier, je parlerai parfois de "sites web écoresponsables" à des fins de référencement ; mes propos s'appliquent toutefois plus largement à toutes les formes de services numériques.

*Sources : We Are Social / Hootsuite, Digital 2020 & L'ADEME, la face cachée du Numérique.

1. Mais au fait : c'est quoi un site web écoresponsable ?

Un site web écoresponsable doit permettre à ses utilisateurs d'accomplir le plus rapidement possible une action donnée avec des moyens proportionnés.

Concrètement :

  1. Pas question de retenir les gens pour de mauvaises raisons ! Il convient au contraire de faciliter le parcours de l'utilisateur afin de le libérer du service numérique au plus vite. À ce jeu-là, le taux de rebond, d'usage synonyme d'échec lorsqu'il est élevé, perd tout son sens puisqu'il devient aussi un indicateur de succès.
  2. Pour l'ensemble du projet web, les moyens mis en œuvre ont un intérêt mesurable pour les utilisateurs. C'est probablement l'aspect le plus délicat à évaluer, relevant aussi bien de la nature, de la pertinence et de la façon dont est amené le contenu, que des fonctionnalités privées (ce que l'administrateur seul peut accomplir), publiques (ce que les utilisateurs, enregistrés ou non, peuvent accomplir) et techniques (nécessaires aux deux précédents types). Il convient d'analyser tous ces éléments en raisonnant avec bon sens pour déterminer si l'utilisateur y trouve son compte.

Bon sens ? Utilisateur ?

Eh oui ! Un site web induisant dans tous les cas des conséquences environnementales, sa frugalité ne devrait pas desservir ses intérêts (et donc, les attentes utilisateurs). Sinon, ce n'est plus qu'une source de pollution.

En clair, l'aspect (éco)responsable d'un outil numérique est intimement lié à l'expérience utilisateur !

2. Les enjeux de la création de services numériques écoresponsables

C'est l'enjeu du site web écoresponsable autour duquel l'on communique le plus souvent : réduire la consommation en données et en énergie à un instant T. L'intention est louable, mais rappelons que la pollution numérique reste pour l'essentiel concentrée en phase de fabrication des divers équipements requis par son exploitation (environ 7 à 8 dixièmes des impacts environnementaux totaux). Les bénéfices liés à un gain énergique dépendant du mode de production d'électricité de la région où ont lieux les usages, ils peuvent aussi varier considérablement.

Pour autant, cela ne signifie pas qu'il ne faille pas faire sa part. Internet, sur lequel repose tout le succès du Numérique, est un trafic bondé à toute heure, plus de la moitié de la planète y est connectée. Les leviers actionnés en phase de conception, aussi minimes soient-ils pris à l'unité, prennent sens à l'échelle phénoménale du réseau.

Si diviser par X fois le poids d'une page web vue par X utilisateurs semble tout juste bon à prendre, il y a une réelle opportunité sur le long terme à rendre moins énergivores les services numériques. Nous renouvelons nos équipements personnels trop vite, et la plupart du temps pour de mauvaises raisons. L'une d'elles, que je décris dans "Efficient, accessible et éthique : les trois dimensions du Web écoresponsable", est que les logiciels / applications et sites web que nous utilisons sont des gouffres énergétiques où l'effort à fournir n'est pas du tout proportionnel au service rendu. Saturant la puissance de notre matériel, ils nous incitent à en changer prématurément bien qu'il soit fonctionnel.

Au-delà de l'expérience utilisateur, largement pénalisée par l'inefficience des produits numériques, il est indiscutable que de nombreux achats de téléphones, tablettes et ordinateurs auraient pu être évités avec une démarche de conception responsable globale de la couche applicative. Au lieu de cela, nous avons compensé des lacunes grandissantes par toujours plus de puissance, et l'offre s'adaptant à la demande, la production a explosé.

La démarche d'écoconception de services numériques porte l'espoir d'un revirement.

En créant des outils compatibles plus longtemps avec un parc moins performant, l'on peut espérer allonger la durée de vie de ces terminaux, améliorer leur réemploi et, de fait, agir concrètement sur l'essentiel de la pollution numérique. Et puisque l'accès au Numérique n'est pas idem pour tous (moyens financiers, maîtrise, accessibilité...), en simplifier l'accès à tous les niveaux est un pas de plus en faveur de l'inclusion.

3. Quel intérêt y a-t-il à adopter une démarche d'éconception ?

L'altruisme est une qualité à défendre. Mais j'assume de diversifier mon argumentaire pour séduire les différents auditoires. Qu'un site web écoresponsable soit meilleur qu'un autre sur le plan environnemental est une chose ; si propriétaires et utilisateurs peuvent en plus en retirer des bénéfices, autant que ces derniers soient connus pour les encourager à franchir le cap de l'écoconception.

En voici une liste non exhaustive.

Préserver l'environnement, c'est aussi soigner son image de marque

Le changement climatique est acté, et autant dire qu'à l'heure où j'écris ces lignes, tous les voyants sont au rouge. Nous nous sentons heureusement de plus en plus concernés par le problème en tant qu'individu, et nombre d'entre-nous se refusent déjà à soutenir des entreprises participant au grand Dérèglement. Les marques qui s'engagent sincèrement à réduire l'impact environnemental de leurs usages numériques ne sauraient être critiquées pour leur prise de position.

Au mieux, elles suscitent un engouement.
Au pire, elles restent dans la course.

Attendrez-vous d'être pointé du doigt pour votre inaction ?

Facilier l'accès à un service, c'est aussi toucher une audience plus large

Un tunnel de conversion est comparable à un entonnoir : l'on y fait rentrer un maximum d'individus à sa base (large), et l'on en récupère quelques convaincus en sortie (étroite).

Les entreprises rêvent d'un monde où le cylindre aurait pris la place du cône, où tout prospect deviendrait client. Impensable. En revanche, et c'est mathématique, accepter plus de monde augmente le volume de conversion. Il y a donc tout lieu d'avoir plus qu'une pensée pour les terminaux qui ne sont pas ou plus l'élite, et pour les consommateurs qui souffrent de troubles d'accessibilité, d'une connexion Internet défaillante ou manquent d'aisance avec le Numérique.

Tu rentres.
Tu rentres pas.

Votre service numérique n'est pas une boîte de nuit, pas vrai ?

Simplifier l'expérience utilisateur, c'est aussi faciliter les conversion

Plus simple est le parcours utilisateur, plus simple est la conversion.

En éliminant les frictions directes (surabondance de fonctionnalités, complexité de l'interface utilisateur) et indirectes (problématiques de performances, instabilités), les utilisateurs réalisent mieux leurs (vos) objectifs.

Pourquoi faire compliqué quand vous pouvez faire simple ?

Utiliser des moyens proportionnés, c'est aussi réduire la dette technique et les coûts d'hébergement

Au-delà des gênes déstabilisant les utilisateurs, il survient des pannes franches ou des vulnérabilités qui poussent à la réaction. Dans la vie d'un service numérique, les troubles sont pour beaucoup liés à sa conception. Cette dette technique, invisible à la mise en production, se fait de plus en plus sentir à mesure que le temps passe, que la communité d'utilisateurs augmente. A vouloir produire vite, l'on perd beaucoup en résilience. Les opérations de maintenance vont se multiplier et cela coûtera cher, très cher.

Quitte à investir, autant le faire dès le départ pour quelque chose de durable. A titre d'exemple, tous clients Awebsome confondus, je n'ai jamais facturé de maintenance en deux ans, parce qu'il n'y en a jamais eu à faire sur mes réalisations. Quel meilleur exemple vous donner ?

Lecture liée : "Réduire ses coûts d'hébergement avec un site web écoresponsable".